Maroc : Le goût de la vie
Fatima aime aller faire les courses au marché, traverser la ville, se faufiler dans les ruelles de la médina jusqu’à ses échoppes préférées. Aujourd’hui, elle se rend au marché des épices et des olives dans le quartier des Habous, aussi connu sous le nom de Nouvelle Médina de Casablanca. L’ambiance y est comme toujours vivante et sonore, les harangues des marchands se mêlent aux klaxons et aux sonnettes de vélo. Dans l’air flottent des arômes de fleur d’oranger et de rose poudrée. Fatima aime contempler les pyramides culinaires éphémères, exhalant des parfums qui chatouillent les narines, promesses de tajines et de couscous dont raffole la famille. Mais cette journée-là a une saveur bien particulière. Pour la première fois, depuis des années, Fatima s’y rend seule. Cette fois-ci Salim, son fils ainé, ne l’accompagne pas. L’esprit paisible, rassurée de savoir Salim bien occupé, elle est en train de regarder une jarre indigo pleine à craquer d’olives vertes, quand elle entend une voix familière.
– Salam alikoum Fatima !
Elle reconnaît son amie de longue date.
– Alikoum salam Zora !
Les deux femmes s’embrassent.
– Tu es seule aujourd’hui ? Qu’est-ce que tu as fait de Salim ?
Zora sait combien il est difficile pour Fatima de laisser son fils, majeur mais trisomique, longtemps seul à la maison. Elle est habituée à voir Fatima avec son fils à ses côtés, partout où elle se rend.
– Tu sais quoi ? Je n’en reviens toujours pas. Tu te rappelles cette association dont je t’ai parlé et qui s’occupe des jeunes atteints de handicap ?